vendredi 20 octobre 2017

Et si on faisait déjà une DARPA française qui marche ?

On le sait, c'est de la DARPA américaine que sont sortis quelques une des plus belles ruptures
technologiques de quarante dernière années, mais on le sait aussi, c'est grâce à la fois à des montants conséquents (non soumis aux caprices politiques du Trésor Américain, la version locale de Bercy) et à une agilité d'approches que ces résultats ont été obtenus (donc dans un contexte culture, technique et économique très différent de celui de la France, voire de l'Europe).
Dans une tribune au Monde, plusieurs décideurs (ou anciens décideurs) civils, économiques et militaires ont co-signé une tribune pour mettre en place une DARPA européenne, d'abord franco-allemande, puis ouverte à d'autres pays du continent (1). Le général Christophe Gomart, ancien GCOS puis DRM, cotoie le patron de Bertin Technologies, de Naval Group et de Photonis, pour secouer le cocotier de l'innovation.
On le sait, c'est une des marottes de la nouvelle mindef, comme ce blog l'a récemment signalé. Mais le travail de financement et d'organisation de l'innovation devrait déjà être rationalisé et libéré, en franco-français, car la seule incantation d'une DARPA ne réglerait rien dans la France actuelle. D'abord, les PME, particulièrement les start-up -d'où proviennent désormais nombre de ruptures- sont insuffisamment irriguées par l'argent public (on leur propose des prêts ou de modestes OER, là où pour les grands groupes, moins désargentés, ce ne sont pas des prêts mais des PEA, avec un changement d'échelle évident...), alors que les grands groupes, qui ont moins de problèmes d'accès au financement -et disposent des relais pour obtenir des crédits de la DGA- raflent l'essentiel.  Avec des succès parfois très relatifs.
L'augmentation annoncée du budget de R&D publique, de 740 MEUR à 1 MdEUR doit donc aussi profiter à ces PME, en faisant néanmoins protéger cet investissement contre les coups de chaluts de groupes étrangers, ou d'actionnaires étrangers d'entreprises françaises qui devaient être vendues par la suite. Et cette irrigation ne doit pas se limiter à une mesurette ici ou là. Une PME, une ETI doit pouvoir normalement bénéficier d'un PEA (plan d'études amont) au même titre qu'un grand groupe (2), si elle en a les capacités technologiques.
Il n'est pas, à ce titre, très logique, qu'un groupe comme l'ETI varoise ECA n'ait pas pu être plus tôt -et plus régulièrement prophète en son pays-, comme c'est le cas aussi pour une autre ETI, Ixsea, dans la navigation, ou encore, l'ensemble CNIM-Bertin. Bref, en un mot comme en cent, il faut arrêter de snober l'innovation où elle se trouve. Enfin si on veut vraiment que cette DARPA aboutisse.

(1) André Loesekrug-Pietri (fondateur d’ACapital), Laurent Alexandre (PDG de NBIC Finance), Stéphane Bancel (PDG de Moderna), Alain Bensoussan (ancien Président du CNES et de l’Inria), Anne Bouverot (ancienne Présidente de Morpho), Alexandre Cadain (CEO, Anima), Jérôme Cerisier (PDG de Photonis), Antoine Clerget (CTO de OneAccess), Pascal Colombani (Président d’honneur de Valeo et ancien administrateur général du CEA), Marie-Odile Crinon (Présidente de MRC2), Christian Dargnat (investisseur), Philippe Demigné (Président de Bertin Technologies), Philippe Gautier (PDG de Nexeya), GCA (2S) Christophe Gomart (ancien Directeur du Renseignement Militaire), Sylvain Guilley (cofondateur de Secure-IC), Hervé Guillou (PDG de Naval Group), Claudie Haigneré (ancienne Ministre Déléguée à la Recherche), Dirk Hoke (PDG , Airbus Defence and Space), Guy Lacroix (Vice-Président d’AKKA Technologies), Marwan Lahoud (Président d’honneur du GIFAS), GAA Denis Mercier (Commandant Suprême Allié pour la Transformation de l'OTAN), Jean-Yves Le Gall (PDG du CNES), GAA (2S) Gratien Maire (ancien Major Général des Armées), Antoine Petit (PDG d’Inria), Bruno Sainjon (PDG de l’Onera), Didier Schmitt (ancien conseiller du Président de la Commission Européenne), Stéphane Siebert (Directeur de la recherche technologique du CEA).
(2) à charge aussi de ces PME/ETI de sortir de leurs guerres gauloise et de grossir en s'alliant ensemble pour atteindre une autre taille.