jeudi 18 mai 2017

Au Sahel, pour voir quoi ?

Emmanuel Macron et probablement sa ministre de la défense Sylvie Goulard doivent débarquer au
Sahel dans quelques heures. Problème, la visite a été annoncée depuis des lustres par le président et le créneau n'a rien de secret, dans une zone où l'adversaire est friand de la moindre information.
Un point, deux points, un peu, beaucoup de presse ? Tout dépendra du temps (et des avions disponibles) pour y arriver. Voilà néanmoins ce que pourrait, par déduction, être tout ou partie de son programme vu que le focus de son déplacement est déjà identifié : le renseignement, la coopération européenne, la reconnaissance de l'engagement des militaires français (plus fort à l'ouest qu'à l'est).Pas forcément difficile de trouver des points de chute sur ces sujets, sans pour autant préjuger de l'ordre dans lequel président et ministre les traiteront.
Sur la base aérienne projetée de Niamey, l'armée de l'air aligne ses yeux (les Reaper, dont les équipages sont soumis à rude épreuve en terme d'effectifs) et ses oreilles, mais aussi son punch (les chasseurs), son soutien aérien logistique, avec les Transall effectuant les livraisons par air qui épargne les vies... ou permettent de continuer les opérations à la saison des pluies.
Dans la BAP, un couteau suisse de 400 militaires, pour l'essentiel aviateurs, on trouve aussi des allemands, qui assurent la même logistique pour la base (allemande) de Gao, oeuvrant au profit de la Minusma. Ces mêmes avions ont déjà à plusieurs reprises évacué des blessés français. Les Français, eux, ont accueilli les Allemands qu'ils nourrissent et hébergent depuis plus d'un an, tout en soutenant leurs Transall. Les yeux du président et de sa ministre devraient briller en voyant une coopération opérationnelle aussi... simple et huilée.
D'autant que demain, les Allemands ne cachent pas qu'ils veulent en faire plus avec les Français et les Nigériens : de vraies voies de développement sont donc présentes, reste à arroser.
La logique est plus complexe à Gao, la base principale de Barkhane. Les Allemands -et les Néerlandais et Suédois avant eux- sont là dans un cadre ONU, avec des règles d'engagement pas très cinétiques. Barkhane et l'ONU cohabitent, mais sans vraie dialogue quotidien. Même avec la meilleure volonté du monde, il sera difficile de changer ce qui existe depuis... l'ONU.
Mais il ne faut rien occulter : à petites touches, les opérations françaises au Sahel ont amené une évolution, légère, mais réelle, des européens, qui participent à leur façon aux opérations, essentiellement sur un plan logistique : britanniques et espagnols transportent du fret en inter et infra-théâtre, les espagnols ravitaillent en vol et font la comops du Gabriel... Bref, chacun aide comme il peut, et comme son opinion publique, pas très africanophile, le souhaite. Les Britanniques, que le général Denis Mercier avait tenté de faire venir avec des Reaper ne sont finalement jamais venus.
Autre pays qu'il ne faut pas oublier, les Etats-Unis. Ils ont bien visualisé avec le Sahel la capacité de la France à pouvoir oeuvrer dans une zone étendue avec une empreinte réduite. Une reconnaissance qui a sans doute facilité de multiples coopérations en matière de renseignement et forces spéciales, sur le continent, et bien plus à l'est.

Mes infops et photos sur le twitter @ defense137.

Un hôpital volant dans un Transall, mais ce dernier est allemand. Un bon exemple de mutualisation au Sahel. Photo JMT
Un Reaper français attend le vert pour une mission de 24h, sans doute au profit des forces spéciales qui sont l'essentiel des bénéficiaires des heures de vol. Photo JMT.

Réentendre à ce sujet le reportage audio sur les Reaper de mon camarade Fourt à cette époque ici.