vendredi 17 avril 2009

Les hélicoptères, une grosse épine dans le pied


"Les hélicoptères ? Attendez le Livre Blanc, la carte militaire, et vous verrez, on va régler tout ça...". La charité chrétienne m'interdit de nommer le général qui me fit cette déclaration quand je le croisai le 21 mars 2008, à Cherbourg. A l'époque, le commandement interarmées des hélicoptères ou CIH avait déjà pris un peu de retard, et pas mal de chevrotines dans les pales(1) et voilà la réponse rassurante qu'obtint mon scepticisme.
Aujourd'hui, le CIH devrait être installé, et fonctionner au jour le jour, comme le fait son homologue britannique. C'est cette rationalisation qui permet à nos alliés britanniques d'aligner bien plus d'hélicoptères que nous en opex. Notamment en Afghanistan.
Je l'écris souvent, quand les premiers boys ont été tués par les IED, la presse britannique s'est immédiatement faite le relais du comptoir du café -du pub en l'occurrence- pour s'étonner de l'absence d'hélicoptères en Afghanistan. Le pauvre Tony Blair a dû dans l'urgence justifier ses carences, et racheter 6 EH101 à l'armée danoise, et lancer le rétrofit de 8 Chinook HC3 stockés. Depuis, on a même ponctionnés les stations SAR de toute la Grande-Bretagne, pour récupérer des Sea King.
En France, pas de bronca, donc... pas de renforcement capacitaire (2). Les rapports parlementaires, les uns après les autres s'étonnent, sans véritable traduction. La réponse, c'est toujours la même, le NH90 arrive, tenez bon... Mais il n'arrivera qu'au compte-gouttes, s'il arrive à l'heure, alors que le Puma, lui, accumule les rustines, comme tout engin conçu au milieu des années 60.
Quant au dernier-né de nos hélicoptères, le Caracal, il est requis pour assurer la SECMAR, parce que personne n'a vraiment voulu régler la douloureuse question du Super Frelon. L'an dernier, le service avait pourtant été interrompu plusieurs semaines, mais personne n'a voulu voir. Ni entendre les questions posées à l'époque, notamment par l'auteur de ces lignes.
Le seul hélicoptère français capable d'opérer en Afghanistan -avec le Cougar de l'ALAT-, déjà en nombre insuffisant est même réquisitionné pour des missions en région parisienne. On a donc fait le total inverse de la Grande-Bretagne : on récupère un hélicoptère de mission pour faire de la SAR (mission qui par ailleurs vaut son pesant de talents mais ce n'est pas le sujet).
En Afghanistan, sans hélicoptère, la surprise tactique n'est pas possible. Quand les Américains nous transportent, c'est possible, sinon, il faut faire sans. Traduction, les Français ont pu ainsi remporter des succès en vallée d'Alassay, grâce au Chinook US, il y a quelques jours. Avec quels hélicoptères la France procèdera-t-elle, quand elle aura son propre regional command ?

(1) un autre dossier, directement dans la main du CEMA n'a toujours pas été réglé, c'est celui de la colocalisation de la flotte de Caracal, qui oblige aujourd'hui, en France, a dupliquer les outillages sur deux sites (Cazaux, Pau) pour une flotte de... 14 appareils. Le dossier devait être réglé début 2008, puis après une période de flottement, un groupe de travail a été missionné. Les conclusions, retardées à la demande de l'armée de Terre, ont finalement été rendues en décembre 2008. Nous sommes en avril 2009 : toujours rien.
(2) le ministre de la Défense a seulement annoncé, fin 2008, commander 5 Caracal, dans la contribution Défense au plan de relance. Aujourd'hui, cette annonce ne serait toujours pas traduite par un bon de commande. Les cinq appareils profiteraient à l'armée de l'Air, dont trois au GAM-56 Vaucluse.

Notre photo : un Caracal de l'armée de l'Air en Afghanistan. Trois appareils de ce type sont actuellement déployés (dont deux opérés par le DAOS), avec trois Gazelle. (crédit : DoD)